Au micro d’Initiale #1 - Laurent Bigarella, Akki

Cette année, Initiale se lance dans une nouvelle aventure et tend son micro !

Passionnés par les médias, nous souhaitions vous faire découvrir les coulisses de la fabrique de l’information en donnant la parole à ses artisans, les journalistes. Ils sont nos interlocuteurs au quotidien. Leur mission : rechercher, analyser et hiérarchiser l’info. Comment ça se passe concrètement ? La vie à la rédac', elle ressemble à quoi ? Et comment les journalistes travaillent-ils avec les RP ?

Désormais, nous vous donnons rendez-vous, chaque trimestre, sur notre blog pour rencontrer un ou une journaliste de Nouvelle-Aquitaine. Et pour cette première édition, nous sommes très heureux d’accueillir Laurent Bigarella, fondateur du média Akki !

Akki, c’est une revue papier de 130 pages qui documente la culture en Nouvelle-Aquitaine. Complément du média web Le Type, fondé en 2011 pour valoriser les initiatives, projets et acteurs culturels du territoire, Akki propose dans des formats plus longs, analyses et réflexions sur la culture régionale et articule ses sujets autour d’une grande thématique (le premier numéro portait sur les contre-cultures, le second sur les périphéries).

Laurent, parle-nous un peu plus de Akki. Comment la revue a-t-elle été imaginée ?

Pendant deux ans, nous avons réfléchi à ce qu’on pourrait proposer de complémentaire au magazine en ligne Le Type. On avait envie de quelque chose de similaire aux sujets abordés, c’est-à-dire la vie culturelle et artistique à Bordeaux et ses environs, mais cette fois-ci sur du temps long. Avec Le Type, on est dans l’actualité chaude, les concerts, les sorties d’albums et les newsletters qu’on envoie tous les mercredis. Akki permet au contraire de prendre du recul et de privilégier l’analyse des sujets. Et le papier s’y prête bien ! Le web se consomme et se renouvelle vite et nous sommes constamment distraits en ligne, notamment par les notifications. Le papier apporte une autre dimension et un autre rapport à la lecture. C’est aussi un objet tangible qui se garde et se collectionne.

« Le papier apporte une autre dimension, on privilégie plus de temps pour l’analyse des sujets »

Combien êtes-vous au sein de l’équipe et comment travaillez-vous ?

Nous avons une « petite » équipe dans le sens où nos rédacteurs travaillaient déjà pour Le Type ou Kultoural (l’association qui gère les deux supports, NDLR) et d’autres se sont greffés à l’aventure en tant que collaborateurs que nous avons rencontrés lors de l’appel à contributions. Cela a insufflé un vent nouveau et le côté collaboratif et participatif nous a semblé très intéressant !

Nous avons aussi sollicité des personnalités qui traitent des sujets que nous souhaitions aborder dans le premier numéro d’Akki (« Contre-cultures ») comme Luc Robène, historien et qui est l’un des instigateurs du projet de recherche Punk Is Not Dead, qui vise à documenter les scènes punks partout en France depuis 1976.

Finalement, nous avons une équipe composée d’une vingtaine de personnes : des journalistes, des chercheurs, des chroniqueurs et des relecteurs. J’avoue que ce n’est pas la partie la plus fun à faire mais c’est tellement important ! Côté graphisme, nous travaillons avec Bureau Nuits et SODAL des imprimeurs basés à Langon. C’était important pour nous de composer avec le côté local, qui est au cœur de la ligne éditoriale et de l’ADN de notre média.

Concernant le rythme de travail, il est étalé sur 6 mois, et c’est un véritable travail de fourmi entre le choix des sujets, l’écriture, la relecture, le BAT à faire valider et revalider, les crédits photos, l’ours, l’édito qui structure la revue. En parallèle, nous sommes constamment en recherche de financements et devons alimenter nos réseaux sociaux pour communiquer sur le projet.

Pour ceux qui ne connaitraient pas Akki, quel article leur recommanderais-tu ?

Dans le premier numéro, il y a un article écrit par Manuel Roux, spécialiste des phénomènes d'apprentissages informels au sein des cultures populaires, sur le Void, haut lieu des cultures alternatives et des nuits bordelaises, et salle de concert indépendante. Fermé une première fois en 2019 pour travaux de mise aux normes, la pandémie leur aura asséné le coup de grâce.

Manuel Roux est revenu sur ce lieu iconique, qui a vu passer bon nombre de groupes, aussi bien locaux qu’internationaux, mais aussi des expositions, des performances, des projections, des DJ sets… mais qui était aussi un lieu d’entraide, de mise en réseau et de dialogue. Il parle notamment « d’intelligence punk », qui s’illustre par ces réseaux collaboratifs où étaient élaborées ces pratiques d’auto-organisation. Des élus et des artistes sont interviewés et l’article incarne bien la thématique du premier numéro « Contre-cultures », c’est-à-dire comment de tels lieux s’ancrent dans une ville à travers des projets comme le Void.

C’était aussi et malheureusement très symbolique, car Bordeaux donne de moins en moins de place pour des acteurs alternatifs. Mais cela pousse les acteurs en périphérie, et c’est là que le deuxième numéro de Akki intervient !

« Le Void était un lieu de passage où les artistes pouvaient venir, jouer leur musique, exprimer leur art, partager de l’amour. Il n’y en a plus énormément à Bordeaux et ça se perd de plus en plus »

Comment un.e attaché.e de presse vous aide au quotidien ?

Finalement assez peu car lorsque nous annonçons la thématique de nos numéros, les sujets sont quasiment validés et l’agence qui nous sollicite aura une fenêtre de tir assez courte. Mais un regard ou une proposition extérieure nous apporte forcément ! Avec Le Type, on travaille beaucoup plus avec les agences de relations presse qui nous parlent de l’actualité d’artistes.

Quel sera le thème du prochain numéro ?

Le troisième numéro de Akki portera sur la question du climat et comment les artistes et les acteurs culturels peuvent prendre part à la lutte contre le réchauffement climatique, notamment en privilégiant des modes de transport plus doux, des lieux de concerts ou festivals où le plastique sera interdit, des caterings végétariens, des services de streaming plus durables car très énergivores, etc.

Chacun de nous a un rôle à jouer, et les artistes aussi. Ces derniers ont un poids médiatique, ils sont prescripteurs et peuvent contribuer à faire évoluer les consciences, à mobiliser des publics sur cette question majeure du climat.

« À l’échelle de la Nouvelle-Aquitaine, c’est mettre en lumière les artistes et les structures qui se bougent pour la planète »

Parlons actu maintenant, y-a-t-il une Une qui t’a particulièrement marqué en tant que journaliste ?

La guerre en Ukraine, malheureusement. J’étais à Kyiv en novembre dernier pour Trax Magazine et We are Europe et j’ai eu l’occasion de rencontrer beaucoup d’artistes de la vie culturelle et électronique locale. Dès le début de la guerre, j’ai suivi leur quotidien sur Instagram. Certains se sont réfugiés à Budapest, d’autres à Berlin. Ca me tient à cœur, je suis toutes les actualités sur Telegram et je me rends compte à quel point nous sommes privilégiés en Europe de l’Ouest.

Le dernier podcast que tu as écouté ?

Je n’écoute pas beaucoup de podcasts natifs, à part Le Super Daily qui décrypte toute l’actualité des réseaux sociaux, mais beaucoup de replays d’émission comme Podcastine, Câblé ! de l’équipe Fimeb ou Soft Power sur France Culture. J’apprécie aussi particulièrement Interdependence un podcast né à Berlin, qui parle du futur des cultures numériques, entre DAO, blockchain ou Métavers. 

Et enfin, les indispensables dans ton sac de journaliste ?

Un smartphone forcément, et de la musique (indispensable à mes journées !) et puis une bonne revue ;)

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