Pour notre 10ème épisode du Micro d’Initiale, nous avons le plaisir d’accueillir Victor Vasseur, journaliste à France Inter. Avec son micro et sa plume affûtée, il décrypte l’actualité et donne du relief aux débats qui animent notre époque. Au fil de cet échange, il revient sur son parcours, son quotidien à France Inter et sa vision du journalisme aujourd’hui.
Quand as-tu su que tu voulais devenir journaliste ?
J’aimais beaucoup le foot quand j’étais gamin (et j’aime toujours autant ça d’ailleurs !) — je lisais tous les magazines de l’Olympique Lyonnais. Assez tôt, je me suis dit que ça devait être génial de faire des reportages, d’interviewer les joueurs… Et le jour où un prof du collège nous a demandé ce qu’on voulait faire plus tard, j’ai simplement tendu mon magazine en disant : « Ça ! ». Pendant longtemps, j’ai voulu devenir journaliste sportif, ou commentateur. J’ai toujours aimé prendre des photos, des notes, garder des archives… Ce goût-là était déjà bien là.
Y a-t-il eu un déclic ou une rencontre qui a confirmé ton choix ?
En avançant dans mes études, j’ai découvert le journalisme radio et ça a été un vrai déclic. La diversité des sujets, des angles à explorer, la liberté qu’offre ce format… tout ça m’a vraiment conforté dans l’idée que j’étais à ma place.
Quel a été ton premier job dans le journalisme ?
J’étais pas spécialement bon en français à l’école, surtout en orthographe (rires), mais je savais que pour passer les concours de journalisme, il fallait un très bon niveau. Du coup, dès le lycée, j’ai commencé à bosser pour Macon Infos (je suis originaire de là-bas) et Sortir à Macon. Je faisais quelques interviews d’artistes autour de concerts, ça me permettait de m’entraîner au métier, mais aussi à la rédaction. J’ai eu mon bac en 2012, enchaîné avec quelques stages à France Bleu, mais aussi dans des radios associatives comme Radio Grenouille, et mon premier vrai poste, c’était à RCF Haute-Savoie, en alternance. Puis je suis retourné à France Bleu, parce que mon rêve, c’était clairement de bosser pour Radio France.
Un souvenir marquant de cette première expérience ?
J’ai vraiment gravi les échelons pour entrer à Radio France : au début, je faisais quelques piges dans des antennes locales, puis j’ai passé le concours interne pour décrocher un CDD… et là, gros soulagement : j’étais enfin dans le giron de Radio France. Je me suis dit « Ça y est, je peux plus les quitter » (rires). Mon CDD a été renouvelé une première fois, puis une deuxième chez France Inter, et l’année suivante, c’était bon : j’ai signé mon CDI. Je bosse à France Inter depuis 2022 !
Quel conseil donnerais-tu au Victor Vasseur qui débutait dans le métier ?
Les métiers du journalisme sont hyper variés ! On peut bosser à la radio, à la télé, en presse écrite, et maintenant aussi sur les réseaux avec des formats comme Brut ou Konbini. On peut se spécialiser dans un domaine, ou au contraire toucher à tout, travailler dans différentes régions… Franchement, c’est un vrai champ des possibles. Mais il faut aussi être prêt à faire quelques sacrifices : au début, on ne compte pas trop ses heures, on doit être disponible, montrer qu’on est motivé. Parfois, ça veut dire voir un peu moins sa famille, ses potes, bosser les week-ends… Mais après, c’est que du kiffe. On enchaîne les reportages, on apprend à poser sa voix, on dépasse sa timidité. Donc ouais : faire quelques sacrifices, oser, et surtout prendre du recul pour voir tout le chemin qu’on a parcouru.
Quelle est ta routine de journaliste à France Inter ? Comment tu organises tes journées entre veille, interviews et écriture ?
Je travaille dans le service « Culture et écrans », donc je traite de sujets autour du cinéma, des séries, des réseaux sociaux, de l’intelligence artificielle, etc. Mes journées sont rythmées par deux conférences de rédaction : une le matin, entre 9h et 10h, et une autre à 15h avec tous les chefs de service. Il y a deux cas de figure : soit j’arrive avec mes propres idées de sujets, pour les journaux de 13h, 20h, ou même pour le lendemain matin ; soit on me fait des commandes. Ensuite, ma journée s’organise autour de ça : traiter les sujets, les écrire, les monter, passer des coups de fil, mener des interviews… Hier, par exemple, j’étais à La Roche-sur-Yon pour un sujet sur France Travail qui utilise l’IA pour recruter des demandeurs d’emploi. Et la semaine dernière, j’étais aux Césars 😎 Ce qui est marrant aussi, c’est que parfois, un même sujet peut intéresser plusieurs services. Par exemple, j’avais proposé de suivre la commission d’enquête au Sénat sur l’utilisation du réseau social TikTok, mais au final c’est le service politique qui l’a reprise !
Qu’est-ce qui te plaît le plus dans la radio par rapport aux autres formats ?
Je n’aime pas trop écrire (même si j’admire vraiment les journalistes qui ont une vraie patte, un style qui fait toute la différence), et le côté technique de la télé, c’est pas trop mon truc non plus. La radio me plaisait déjà beaucoup ! Déjà parce qu’on apprend à poser sa voix, à transmettre une info de manière concise, à trouver le mot juste. Et puis, dans la construction des sujets, il y a une écriture très imagée, on va à l’essentiel. Parfois, tu dois résumer en 1 minute 10 ce qu’une personne t’a expliqué pendant 15 minutes, c’est un vrai exercice, mais c’est ce que j’adore.
Comment se prépare une émission sur France Inter ?
Il faut être très réactif ! En général, je commence par m’acculturer au sujet : je creuse un peu, je me renseigne pour bien comprendre de quoi il s’agit, et ensuite je dresse une liste des personnes que je pourrais contacter — des experts, des intervenants, des gens qui peuvent m’aider à décoder le sujet mais aussi à en parler. En ce moment, je travaille sur un sujet autour de Charles Biétry, l’ancien directeur des sports de Canal+. Dans une interview diffusée dans Sept à Huit, ils ont recréé sa voix grâce à l’intelligence artificielle, parce qu’il est atteint de la maladie de Charcot et ne peut plus parler. J’ai tenté de contacter la boîte de production, sans succès pour l’instant. Finalement, j’arrive à échanger avec le présentateur de l’émission, qui me propose un autre angle : est-ce qu’il existe déjà des gens qui utilisent l’IA pour parler ? En creusant cette piste, je tombe sur une boîte française qui développe justement cette technologie. J’organise une interview avec eux et je cherche actuellement un témoignage de patient utilisateur. Si ça fonctionne, j’ai mon sujet.
Les médias sont souvent critiqués, notamment sur la question de la confiance du public. Comment, en tant que journaliste, on peut recréer ce lien avec les lecteurs/auditeurs ?
Mes sujets sont plutôt « froids », factuels. J’essaie toujours de repérer les angles morts, les biais que je pourrais avoir, de m’assurer que je donne la parole à tout le monde. Et surtout, quand je traite un sujet que je ne maîtrise pas à 100 %, je fais tout pour l’appréhender du mieux possible. Si la personne experte qui écoute trouve ça juste, alors pour moi, c’est gagné. Je fais aussi très attention à ne pas transformer les propos des personnes que j’interviewe. Parce que parfois, on peut mal comprendre une réponse, ou en voulant trop condenser, on fait un raccourci qui fausse tout. Donc pour moi, c’est : faire confiance, et donner confiance. Et puis surtout, en abordant plein de sujets, j’essaie aussi de contribuer à expliquer, à éduquer… à lutter contre les fake news et les théories complotistes.
Quel est le média (radio, presse écrite, numérique…) que tu suis et qui t’inspire aujourd’hui ?
J’adore Libé, c’est un peu mon journal doudou, parce que je l’ai toujours lu. Le Monde, je le lis pour ses grandes enquêtes, et Le Figaro surtout pour ses pages Tech & Web, que je trouve vraiment bien faites. Sur les réseaux, je suis assez fan de Brut pour leurs formats reportages, et Néo pour les témoignages, que je trouve souvent très forts.